« Figurer le monde »
Vincent Bioulès
L'exposition propose un large panorama des peintures réalisées par l'artiste dans les paysages de la Méditerranée pour la première fois réunies dans une exposition d'ensemble. Elle rassemble une cinquantaine d'œuvres, des grands formats, et un ensemble de dessins et aquarelles des années soixante-dix à ce jour, provenant de musées et collections particulières.
Les œuvres s'articulent autour des lieux et pays suivants : Aix, Aigues Mortes, Marseille, Céret, Bizerte, Rome, Egypte, Israël et les environs de Montpellier. Si quelques-unes d’entre elles sont consacrées à la mythologie méditerranéenne, toutes sont centrées sur le thème de prédilection de l’artiste : le paysage.
« Figurer le monde »
Vincent Bioulès est né à Montpellier où il vit toujours. À l’issue d’une jeunesse nourrie par la grande tradition classique du paysage, il abandonne la figuration pour l’abstraction, au cours des années 60 et le début des années 70. Il s’investit notamment dans le groupe Support/Surfaces dont il est l’inventeur du nom. Mais son amour pérenne pour les paysages et la nature le ramène à la figuration, à partir de 1974. De son expérience abstraite, il conserve un lexique et une syntaxe qu’il continue ensuite d’utiliser pour
« figurer le monde ».
La série Places et fontaines d’Aix en Provence inaugure sa « refiguration ». Puis il y aura Les Intérieurs, les tableaux religieux (Saint-François d’Assise), Les Portraits en 1988, Les Nus en 1990. Il se consacre ensuite essentiellement aux paysages - Marseille, Les Mythologies (sur fond de paysage), Aigues Mortes, Céret ... - aujourd’hui centrés sur le thème du Souvenir. Il explique : « ma peinture est le témoignage d’une nostalgie. Le paysage qui s’offre à nos yeux, cet espace, cette béance est la métaphore du vide, de l’absence, de la perte et du désir que je porte en moi-même. Nous nous souvenons tous de ce que nous avons perdu, même si ce que nous avons perdu ne nous a jamais appartenu réellement. Nous nous souvenons d’un AILLEURS, d’un AUTREFOIS qui hante notre âme et dont le paysage est la métaphore ».
La genèse d’un travail binaire
Mais « la recherche du style se fait à l’atelier (...), le style, c’est la maîtrise de la jouissance ».
Le dessin, longuement repris, y concourt. « Voie royale de la compréhension du monde », il construit, structure rigoureusement l’espace et permet ainsi de passer du réel à l’organisation de la réalité, c’est-à-dire à la vision intérieure de l’artiste. Un dessin cerné, acéré, architecturé, sur la qualité duquel repose
ensuite l’exécution colorée, à laquelle de multiples recouvrements confèrent un éclat particulier. La lumière franche, blanche et dure, révèle les formes et fait naître l’émotion profonde, métaphysique, propice au rêve.
S’il peint plusieurs fois le même site, c’est pour mieux le simplifier, l’élaguer et, du coup, le renforcer, pour « rendre de plus en plus intense le sentiment premier qu’il a pu éprouver ». Mais - angles différents, heures diverses de la journée... - les paysages se distinguent les uns des autres. Et même s’il en manipule, synthétise ou schématise l’aspect, leurs particularités sont présentes. On les reconnaît. Et cependant, ils restent universels.
Il en est ainsi de l’île Maïre, à Marseille, « une énorme matière brute » selon Jean-Marie Souleyran, qui mange l’espace et semble léviter sur la mer jusqu’à sortir du cadre ; ainsi de La villa Bianco cadrée par des lignes géométriques, sa jetée déserte, le silence, la lumière blanche aveuglante et implacable, la solitude ; comme de La Ponche - Rêve II, sa dimension poétique, le bleu intense de sa mer mouchetée de crêtes d’écume blanches ; ou encore des masses imposantes et telluriques de la Sainte Victoire et du Pic saint Loup - Un soir d’hiver au coucher du soleil- ; ou bien de Lumière d’Août, du côté d’Aigues-Mortes, d’une limpidité et d’un réalisme précis et saisissant.
Parfois figurent des personnages, perdus dans cette immensité (on reconnaît même leur voiture, dans L’Île Maïre !). C’est notamment le cas dans Les Mythologies où le comportement trivialement humain de ces icônes les ramène à la banalité de notre condition.
Aujourd’hui, Bioulès s’est libéré de ses entraves passées, liées notamment « au souci d’être de son temps ». Il est ainsi revenu à la perspective. Et si, en 1975, perdurait encore un travail volontariste dominé par la réflexion, ce qui compte pour lui à présent, c’est de s’exprimer le plus simplement possible, de façon beaucoup plus instinctive, directe, rapide.
Il accepte désormais de se référer davantage à son désir, auquel il laisse libre cours, plutôt qu’à la réflexion.« Je veux être chaque jour plus proche de mon sentiment intérieur, de plus en plus véridique. Aujourd’hui, en un véritable retournement, j’accepte en vieillissant d’être vulnérable, c’est ainsi que le peu que l’on sait devient authentique », dit-il.
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Musée de Lodève
Photographies Pierre Schwartz.
Square Georges Auric - 34700 Lodève
Ouvert tous les jours sauf le lundi de 9h 30 à 12h et de 14h à 18h.
Tel : 04 67 88 86 10 Fax : 04 67 44 48 33
Mail : museelodeve@lodeve.com
Tarifs d’entrée : normal 3,5€, réduit 2€
Classes extérieures à Lodève : 24 €
Gratuit pour les élèves de la Communauté de communes du Lodévois et Larzac
(1) in entretien avec Alain Paire , 31 mars 2003
Entretien de Vincent Bioulès avec Alain Paire - Mars 2006
Pour consulter c'est entretien très enrichissant, cliquez ICI