Saint-Laurent-du-Maroni : la Capitale du bagne.
Le tournage de ce film-documentaire s’est déroulé en grande partie à Saint-Laurent-du-Maroni, étape obligée. Le but du document est de faire un état de lieux du système concentrationnaire établi en Guyane par la France dans les dernières années de son fonctionnement.
Ainsi, c’est à travers l’histoire de quatre bagnards que le réalisateur démontre l’échec total de cette entreprise coloniale. Il nous propose de découvrir qui ils étaient avant d’arriver sur cette terre de « la grande punition ». Ce qu’ils sont devenus pendant et après leur séjour au bagne, un reflet de la vie des quelque 90 000 condamnés qui ont partagé le même destin de 1852 à 1953.
Pour reconstituer le parcours de ces protagonistes, Patrick Barberis s’est inspiré de documents inédits : archives du bagne, mémoires écrites par ces bagnards et témoignages de personnes qui les ont connus personnellement.
J’ai rencontré TRAN KHAC MAN alias LAM MANG HO ou Monsieur LAM en 1998, dernier survivant du bagne des Annamites, maintenant décédé.
Voici son histoire... Celle d'un Mandarin d'Indochine condamné au bagne à perpétuité.
Ainsi, c’est à travers l’histoire de quatre bagnards que le réalisateur démontre l’échec total de cette entreprise coloniale. Il nous propose de découvrir qui ils étaient avant d’arriver sur cette terre de « la grande punition ». Ce qu’ils sont devenus pendant et après leur séjour au bagne, un reflet de la vie des quelque 90 000 condamnés qui ont partagé le même destin de 1852 à 1953.
Pour reconstituer le parcours de ces protagonistes, Patrick Barberis s’est inspiré de documents inédits : archives du bagne, mémoires écrites par ces bagnards et témoignages de personnes qui les ont connus personnellement.
J’ai rencontré TRAN KHAC MAN alias LAM MANG HO ou Monsieur LAM en 1998, dernier survivant du bagne des Annamites, maintenant décédé.
Voici son histoire... Celle d'un Mandarin d'Indochine condamné au bagne à perpétuité.
La France en Indochine.
Le Laos, le Cambodge et l’ensemble Annam-Tonkin qui, depuis 1887, formaient l’Union indochinoise, étaient des protectorats c’est-à-dire des Etats « protégés » ne dépendant des instances françaises que dans le domaine de la défense et des affaires étrangères. En tant que tel, chaque état « protégé » devait garder son autonomie et devait rester maître de sa destinée.
En réalité, les protectorats indochinois perdirent rapidement toute signification véritable par suite de l’envahissement par la France de toute l’activité gouvernementale et administrative : c’est ainsi qu’à tous les échelons, « les mandarins » furent doublés par des fonctionnaires français et qu’à partir de novembre 1925, une convention confiait au seul Gouverneur Général de l’Union indochinoise la nomination des ministres et des fonctionnaires impériaux, enlevant de ce fait au souverain, l’empereur d’Annam, toute possibilité d’intervenir dans la justice et l’administration. L’autorité réelle appartenait donc au Gouverneur Général et à ses exécutants, les résidents de chaque province. Quant aux autres postes de commandement, ils étaient eux aussi entre les mains d’administrateurs français.
C’était rejeter dans l’opposition voire dans la révolte les jeunes intellectuels autochtones titulaires des diplômes les plus élevés. A cela, s’ajoutait l’absence à peu près complète de liberté ce qui rendait le régime particulièrement oppressif. Le milieu populaire n’était pas épargné et les lourdes taxes levées par les Gouverneurs Généraux afin d’avoir un budget en équilibre, pressurait les classes laborieuses, notamment les paysans.
Pourtant, de 1926 à 1928, le Gouverneur Général Alexandre Varenne eut une vue d’esprit plus large. Il décida l’accession des fonctionnaires indochinois à tous les postes de direction et de contrôle. Il créa la Chambre des Représentants en ANNAM et au TONKIN. Il prit des mesures pour protéger la main d’œuvre dans les plantations et dans le but de débarrasser le pays de ce fléau que constituait le prêt usuraire, il institua le crédit populaire.
Pendant ce temps-là, LAM MANG HO ou Monsieur LAM…
Né dans la Province de l’Annam à Pha Co en 1903, dans une famille bourgeoise, car le père était mandarin. Il a bénéficié d’une excellente éducation, car cette profession de fonctionnaires lettrés représentait un idéal depuis plusieurs millénaires en Chine et dans les pays environnants. Les manuels destinés aux écoles supérieures perpétuaient l’esprit du chapitre « Ruxing » du Li ji. C’est ainsi que dans les Jinghum, publiés en 1907 à l’intention des écoles supérieures, on se réfère encore au Canon des poèmes pour définir le parfait fonctionnaire qui « jour et nuit, sans défaillance, exerce respectueusement sa charge » ; et l’on cite Confucius, selon qui le lettré-fonctionnaire « sacrifie sa vie pour sauver sa vertu ».
Ainsi, avant l’intervention française dans la Province de l’Annam, le fonctionnement de cette société agraire, en grande partie autarcique, et par conséquent centrifuge avec un artisanat et une bourgeoisie peu développée, dépendait fatalement d’administrateurs, de gestionnaires dont la fonction, « socialement nécessaire et indispensable », consistait à « coordonner, surveiller, diriger le travail productif » des autre sujets. Les mandarins détenaient le monopole du fer, du sel, du thé, du cuivre, de l’argent, ils représentaient le pouvoir politique et administratif, et à l’intérieur de leur propre aristocratie, le recrutement s’exerçait par cooptation.
Dans ce contexte Monsieur LAM devient lui même mandarin, fonction qu’il exerçait avec zèle et qui lui rapportait beaucoup d’argent. Il me confiait qu’il portait des vêtements cousus de fils d’or, avec des boutons en or. Cette vie facile l’avait amené à beaucoup jouer aux jeux d’argent, dont les cartes, avec une réputation de flambeur. Il aimait inviter ses nombreux amis de jeux dans le luxe et l’opulence, il avait besoin de beaucoup d'argent.
Alors les aléas de cette vie dissolue, et les réorganisations administratives locales l’incitèrent à trouver "des revenus" par des moyens bien moins honorables : la piraterie.
En réalité, les protectorats indochinois perdirent rapidement toute signification véritable par suite de l’envahissement par la France de toute l’activité gouvernementale et administrative : c’est ainsi qu’à tous les échelons, « les mandarins » furent doublés par des fonctionnaires français et qu’à partir de novembre 1925, une convention confiait au seul Gouverneur Général de l’Union indochinoise la nomination des ministres et des fonctionnaires impériaux, enlevant de ce fait au souverain, l’empereur d’Annam, toute possibilité d’intervenir dans la justice et l’administration. L’autorité réelle appartenait donc au Gouverneur Général et à ses exécutants, les résidents de chaque province. Quant aux autres postes de commandement, ils étaient eux aussi entre les mains d’administrateurs français.
C’était rejeter dans l’opposition voire dans la révolte les jeunes intellectuels autochtones titulaires des diplômes les plus élevés. A cela, s’ajoutait l’absence à peu près complète de liberté ce qui rendait le régime particulièrement oppressif. Le milieu populaire n’était pas épargné et les lourdes taxes levées par les Gouverneurs Généraux afin d’avoir un budget en équilibre, pressurait les classes laborieuses, notamment les paysans.
Pourtant, de 1926 à 1928, le Gouverneur Général Alexandre Varenne eut une vue d’esprit plus large. Il décida l’accession des fonctionnaires indochinois à tous les postes de direction et de contrôle. Il créa la Chambre des Représentants en ANNAM et au TONKIN. Il prit des mesures pour protéger la main d’œuvre dans les plantations et dans le but de débarrasser le pays de ce fléau que constituait le prêt usuraire, il institua le crédit populaire.
Pendant ce temps-là, LAM MANG HO ou Monsieur LAM…
Né dans la Province de l’Annam à Pha Co en 1903, dans une famille bourgeoise, car le père était mandarin. Il a bénéficié d’une excellente éducation, car cette profession de fonctionnaires lettrés représentait un idéal depuis plusieurs millénaires en Chine et dans les pays environnants. Les manuels destinés aux écoles supérieures perpétuaient l’esprit du chapitre « Ruxing » du Li ji. C’est ainsi que dans les Jinghum, publiés en 1907 à l’intention des écoles supérieures, on se réfère encore au Canon des poèmes pour définir le parfait fonctionnaire qui « jour et nuit, sans défaillance, exerce respectueusement sa charge » ; et l’on cite Confucius, selon qui le lettré-fonctionnaire « sacrifie sa vie pour sauver sa vertu ».
Ainsi, avant l’intervention française dans la Province de l’Annam, le fonctionnement de cette société agraire, en grande partie autarcique, et par conséquent centrifuge avec un artisanat et une bourgeoisie peu développée, dépendait fatalement d’administrateurs, de gestionnaires dont la fonction, « socialement nécessaire et indispensable », consistait à « coordonner, surveiller, diriger le travail productif » des autre sujets. Les mandarins détenaient le monopole du fer, du sel, du thé, du cuivre, de l’argent, ils représentaient le pouvoir politique et administratif, et à l’intérieur de leur propre aristocratie, le recrutement s’exerçait par cooptation.
Dans ce contexte Monsieur LAM devient lui même mandarin, fonction qu’il exerçait avec zèle et qui lui rapportait beaucoup d’argent. Il me confiait qu’il portait des vêtements cousus de fils d’or, avec des boutons en or. Cette vie facile l’avait amené à beaucoup jouer aux jeux d’argent, dont les cartes, avec une réputation de flambeur. Il aimait inviter ses nombreux amis de jeux dans le luxe et l’opulence, il avait besoin de beaucoup d'argent.
Alors les aléas de cette vie dissolue, et les réorganisations administratives locales l’incitèrent à trouver "des revenus" par des moyens bien moins honorables : la piraterie.
M. LAM en septembre 1998.
Le pavillon rouge ou « Le Fléau de la Mer ».
Madame Hon-Cho-Lo était mariée à un chef pirate et, à la mort de celui-ci, en 1921, elle lui succéda au commandement de sa flotte. Madame Lo, eut tôt fait de plonger dans la terreur toute la région où elle fit régner les meilleures traditions de la profession sur une soixantaine de jonques de mer. Bien que jeune et jolie, elle acquit une solide réputation comme assassin et comme pirate. Ces jonques étaient réunies en six escadres, et chacune de celles-ci portait un pavillon de couleur particulière, rouge, jaune, vert noir, bleu ou blanc. Elles étaient conduites par des lieutenants qui, tout comme les boucaniers étaient connus sous divers nom de guerre : « L’oiseau et la Pierre », « Le Fléau de la Mer », « Le Joyau de tout l’Equipage », et « La Pâture des grenouilles ».
Madame le commandant exigeait une discipline de fer. elle créa pour son équipage un code de règles, qui ressemblent assez à celle auxquelles souscrivaient les premiers pirates européens. Voici trois de ces articles :
1 – Si un homme va à terre pour son compte ou s’il commet l’acte appelé « franchir les barrières », il aura les oreilles percées en présence de toute la flotte ; en cas de récidive, il sera mis à mort ;
2 – Il est interdit de prendre à titre privé la moindre chose du butin provenant du vol et du pillage. Tout sera enregistré et le pirate recevra pour lui deux parts sur dix, les huit autres appartiendront au magasin dénommé le fonds général ; prendre quoi que ce soit de ce fonds général entraînera la mort ;
3 – Personne ne devra débaucher pour son plaisir les femmes captives dans les villages ou la campagne et amenées à bord d’un navire, on devra d’abord demander la permission à l’économe et se retirer dans la cale du navire. User de violence à l’égard d’une femme sans la permission de l’économe sera puni de mort.
Madame Lo était également une excellente femme d’affaire. Tout le butin pris devait être soigneusement inscrit sur un registre tenu à cette intention au magasin. Elle avait sur son métier des vues plus distinguées que le monde extérieur ; parmi les instructions on en trouve une qui interdit l’usage de ce vilain mot « le butin » et elle ordonne de le désigner à l’avenir sous le nom de « produits transbordés ».
La valeur éclairée de la dame produisait d’heureux résultats dont le moindre ne fut pas la création de relations amicales entre ses pirates et le peuple du pays, relations qui furent entretenues par ses ordres prescrivant que tout le vin, le riz et les autres produits seraient payés et que toute spoliation des villageois serait punie de la peine capitale. Il en résulta que sa flotte fut toujours très bien pourvue en provisions et en poudre à canon et que la discipline de ses équipages était exemplaire ou peu s’en faut.
Dans ce contexte, Monsieur LAM eut tôt fait de faire valoir son talent d’homme d’affaire et d’expert comptable en sa qualité de mandarin, et il devint l’économe de la flotte et gestionnaire du magasin durant de nombreuses années. Les actes de pirateries se succédèrent, surprenant et pillant les villages d’où elle enlevait d’ordinaire cinquante à soixante jeunes filles pour les vendre.
Mais toutes les forces terrestres et maritimes du pays étaient sur leurs traces, et cette bande de pirates finit par tomber aux mains des forces de police en 1930. Monsieur LAM et Madame Lo arrêtés ont été enclins de dénoncer leurs compagnons de brigandage. A moment du procès, la jeune et jolie Madame Lo et qui paraissait si fragile, se défendit si bien, qu’elle fit porter l’intégralité des charges sur Monsieur LAM. Ce dernier fut ainsi condamné à perpétuité aux travaux de forces et déporté au bagne de Poulo-Condo ou Côn- Dao, archipel situé à 100 km. de la pointe Sud de l’Indochine (voir carte ci-dessus). Il est formé de 12 îles dont trois servaient de lieu de déportation et de relégation dont les vestiges,encore bien visibles de nos jours, rappellent ceux du camp de la réclusion de l’Ile Saint-Joseph au large de Kourou en Guyane.
Madame le commandant exigeait une discipline de fer. elle créa pour son équipage un code de règles, qui ressemblent assez à celle auxquelles souscrivaient les premiers pirates européens. Voici trois de ces articles :
1 – Si un homme va à terre pour son compte ou s’il commet l’acte appelé « franchir les barrières », il aura les oreilles percées en présence de toute la flotte ; en cas de récidive, il sera mis à mort ;
2 – Il est interdit de prendre à titre privé la moindre chose du butin provenant du vol et du pillage. Tout sera enregistré et le pirate recevra pour lui deux parts sur dix, les huit autres appartiendront au magasin dénommé le fonds général ; prendre quoi que ce soit de ce fonds général entraînera la mort ;
3 – Personne ne devra débaucher pour son plaisir les femmes captives dans les villages ou la campagne et amenées à bord d’un navire, on devra d’abord demander la permission à l’économe et se retirer dans la cale du navire. User de violence à l’égard d’une femme sans la permission de l’économe sera puni de mort.
Madame Lo était également une excellente femme d’affaire. Tout le butin pris devait être soigneusement inscrit sur un registre tenu à cette intention au magasin. Elle avait sur son métier des vues plus distinguées que le monde extérieur ; parmi les instructions on en trouve une qui interdit l’usage de ce vilain mot « le butin » et elle ordonne de le désigner à l’avenir sous le nom de « produits transbordés ».
La valeur éclairée de la dame produisait d’heureux résultats dont le moindre ne fut pas la création de relations amicales entre ses pirates et le peuple du pays, relations qui furent entretenues par ses ordres prescrivant que tout le vin, le riz et les autres produits seraient payés et que toute spoliation des villageois serait punie de la peine capitale. Il en résulta que sa flotte fut toujours très bien pourvue en provisions et en poudre à canon et que la discipline de ses équipages était exemplaire ou peu s’en faut.
Dans ce contexte, Monsieur LAM eut tôt fait de faire valoir son talent d’homme d’affaire et d’expert comptable en sa qualité de mandarin, et il devint l’économe de la flotte et gestionnaire du magasin durant de nombreuses années. Les actes de pirateries se succédèrent, surprenant et pillant les villages d’où elle enlevait d’ordinaire cinquante à soixante jeunes filles pour les vendre.
Mais toutes les forces terrestres et maritimes du pays étaient sur leurs traces, et cette bande de pirates finit par tomber aux mains des forces de police en 1930. Monsieur LAM et Madame Lo arrêtés ont été enclins de dénoncer leurs compagnons de brigandage. A moment du procès, la jeune et jolie Madame Lo et qui paraissait si fragile, se défendit si bien, qu’elle fit porter l’intégralité des charges sur Monsieur LAM. Ce dernier fut ainsi condamné à perpétuité aux travaux de forces et déporté au bagne de Poulo-Condo ou Côn- Dao, archipel situé à 100 km. de la pointe Sud de l’Indochine (voir carte ci-dessus). Il est formé de 12 îles dont trois servaient de lieu de déportation et de relégation dont les vestiges,encore bien visibles de nos jours, rappellent ceux du camp de la réclusion de l’Ile Saint-Joseph au large de Kourou en Guyane.
Le La Martinière par Francis Lagrange
Des tensions politiques à la déportation en Guyane française.
Les mesures courageuses de Varenne, évoquées précédemment, furent dans l’ensemble bien accueillies par le peuple vietnamien car elles répondaient aux revendications du parti constitutionnaliste, mouvement à tendance modérée fondé en 1925.
Dans les milieux extrémistes déjà prêts à l’action, tel le parti Viêt-Nam Quo Dan Dang ( V.N.Q.D.D.) fondé par Nguyen Thai Hoc, parti national à tendance révolutionnaire, ces mesures suscitèrent l’expectative. En effet, elles provoquèrent une levée de bouclier dans certains milieux coloniaux qui déclanchèrent une ardente campagne de dénigrement contre Varenne, invité à ne pas renouveler son mandat.
Quoi qu’il en soit, ces mesures devinrent inexistantes dès le départ de son auteur, ce qui provoqua un durcissement très net des positions du parti national et du parti communiste indochinois qui venait de se constituer au lendemain du IV° congrès de l’Internationale communiste en septembre 1928, avec à sa tête Nguyen Ai Quoc ( futur Ho Chi Ming ) qui se trouvait au Siam d’où il pilotait les cellules.
La tension atteindra son paroxysme le 10 février 1930, lorsque le nationaliste Nguyen Thai Hoc souleva la garnison de Yen Bay dans la vallée du Fleuve Rouge et fit lancer des bombes dans les rues d’Hanoi.
Cette épreuve sanglante avorta et les nationalistes arrêtés furent envoyés en prison au bagne de Poulo-Condor. Cette tentative se poursuivit par des mouvements de grève à la Société cotonnière de Nam Dinh, dans le delta du Fleuve Rouge et dans les plantations d’hévéas.
Les communistes, quant à eux, préférèrent aux méthodes terroristes des nationalistes, les mobilisations de masses telles celles qui furent organisées par les soviets de Nhé-An et qui rassemblèrent plusieurs milliers de paysans. Cependant, à l’instar du V.N.Q.D.D., le parti communiste naissant fur à son tour décimé par les arrestations.
L’insécurité que faisait peser les prisonniers politiques dans les maisons centrales et au pénitencier de Poulo-Condor, ainsi que la menace d’une éventuelle insurrection, firent craindre le pire. Aussi le gouverneur général Pasquier décida d’éloigner les éléments subversifs et de les diriger vers une terre lointaine où ils seraient utilisés à des travaux d’utilité publique.
La création en Guyane française, le 6 juin 1930, d’un territoire autonome, l’ININI, qu’il convenait de mettre en valeur arriva à point nommé. Ainsi, dans les derniers jours du mois d’avril 1931, une centaine de condamnés politiques et plus de 400 condamnés de droit commun ( soit au total 525 détenus ) quittèrent les maisons d’arrêt d’Hanoi, de Saigon et le bagne de Poulo-Condor pour embarquer sur le vapeur La Martinière, ancien Duala. Ce vapeur de cent vingt mètres de long et seize de large, armé par la Société Nantaise de Navigation, assurait d’ordinaire le transport des condamnés de Saint-Martin-de-Ré à Saint-Laurent-du-Maroni avec une escale à Alger pour embarquer les condamnés nord-africains. Construit en 1912, il a été désarmé en 1939.
Monsieur LAM faisait partie du convoie comme volontaire pour continuer à purger sa peine de travaux forcés en GUYANE, car son « statut » de pirate mettait régulièrement sa vie en danger dans cet univers carcéral où sévissait un code interne qui était hostile à ces derniers.
Dans les cales, sous l’autorité du commandant de bord et la surveillance de militaires les condamnés étaient enfermés dans des cages aménagées et ils disposaient juste de la place suffisante pour étendre leur hamac, parfois un pour deux. Au besoin des tuyaux qui parcouraient ces prisons pouvaient déverser des flots de vapeurs brûlantes sur ces hommes pour enrayer ou réprimer tout mouvement de mauvaise humeur.
Les condamnés étaient réveillés à cinq heures et demie, et une heure plus tard, ils étaient soumis au « décrassage ». Nus, debout à une extrémité de leur cage, ils étaient aspergés avec de l’eau de mer. Ensuite, ils effectuaient en silence une promenade d’une heure sur le pont. Les repas étaient servis à midi et seize heures trente, un morceau de viande de bœuf qui nageait dans un bouillon clair accompagné d’une ration de pain. Les toilettes étaient constituées d’un bac qui circulait d’homme à homme en fonction des besoins.
Malgré ces conditions d’hygiène de grande promiscuité, le voyage s’est effectué dans d’assez bonnes conditions, puisque deux décès seulement furent enregistrés. L’un à la suite d’un règlement de compte, et l’autre pour cause de maladie.
Après 35 jours de traversée, le navire accosta au port de Cayenne.
Dans les milieux extrémistes déjà prêts à l’action, tel le parti Viêt-Nam Quo Dan Dang ( V.N.Q.D.D.) fondé par Nguyen Thai Hoc, parti national à tendance révolutionnaire, ces mesures suscitèrent l’expectative. En effet, elles provoquèrent une levée de bouclier dans certains milieux coloniaux qui déclanchèrent une ardente campagne de dénigrement contre Varenne, invité à ne pas renouveler son mandat.
Quoi qu’il en soit, ces mesures devinrent inexistantes dès le départ de son auteur, ce qui provoqua un durcissement très net des positions du parti national et du parti communiste indochinois qui venait de se constituer au lendemain du IV° congrès de l’Internationale communiste en septembre 1928, avec à sa tête Nguyen Ai Quoc ( futur Ho Chi Ming ) qui se trouvait au Siam d’où il pilotait les cellules.
La tension atteindra son paroxysme le 10 février 1930, lorsque le nationaliste Nguyen Thai Hoc souleva la garnison de Yen Bay dans la vallée du Fleuve Rouge et fit lancer des bombes dans les rues d’Hanoi.
Cette épreuve sanglante avorta et les nationalistes arrêtés furent envoyés en prison au bagne de Poulo-Condor. Cette tentative se poursuivit par des mouvements de grève à la Société cotonnière de Nam Dinh, dans le delta du Fleuve Rouge et dans les plantations d’hévéas.
Les communistes, quant à eux, préférèrent aux méthodes terroristes des nationalistes, les mobilisations de masses telles celles qui furent organisées par les soviets de Nhé-An et qui rassemblèrent plusieurs milliers de paysans. Cependant, à l’instar du V.N.Q.D.D., le parti communiste naissant fur à son tour décimé par les arrestations.
L’insécurité que faisait peser les prisonniers politiques dans les maisons centrales et au pénitencier de Poulo-Condor, ainsi que la menace d’une éventuelle insurrection, firent craindre le pire. Aussi le gouverneur général Pasquier décida d’éloigner les éléments subversifs et de les diriger vers une terre lointaine où ils seraient utilisés à des travaux d’utilité publique.
La création en Guyane française, le 6 juin 1930, d’un territoire autonome, l’ININI, qu’il convenait de mettre en valeur arriva à point nommé. Ainsi, dans les derniers jours du mois d’avril 1931, une centaine de condamnés politiques et plus de 400 condamnés de droit commun ( soit au total 525 détenus ) quittèrent les maisons d’arrêt d’Hanoi, de Saigon et le bagne de Poulo-Condor pour embarquer sur le vapeur La Martinière, ancien Duala. Ce vapeur de cent vingt mètres de long et seize de large, armé par la Société Nantaise de Navigation, assurait d’ordinaire le transport des condamnés de Saint-Martin-de-Ré à Saint-Laurent-du-Maroni avec une escale à Alger pour embarquer les condamnés nord-africains. Construit en 1912, il a été désarmé en 1939.
Monsieur LAM faisait partie du convoie comme volontaire pour continuer à purger sa peine de travaux forcés en GUYANE, car son « statut » de pirate mettait régulièrement sa vie en danger dans cet univers carcéral où sévissait un code interne qui était hostile à ces derniers.
Dans les cales, sous l’autorité du commandant de bord et la surveillance de militaires les condamnés étaient enfermés dans des cages aménagées et ils disposaient juste de la place suffisante pour étendre leur hamac, parfois un pour deux. Au besoin des tuyaux qui parcouraient ces prisons pouvaient déverser des flots de vapeurs brûlantes sur ces hommes pour enrayer ou réprimer tout mouvement de mauvaise humeur.
Les condamnés étaient réveillés à cinq heures et demie, et une heure plus tard, ils étaient soumis au « décrassage ». Nus, debout à une extrémité de leur cage, ils étaient aspergés avec de l’eau de mer. Ensuite, ils effectuaient en silence une promenade d’une heure sur le pont. Les repas étaient servis à midi et seize heures trente, un morceau de viande de bœuf qui nageait dans un bouillon clair accompagné d’une ration de pain. Les toilettes étaient constituées d’un bac qui circulait d’homme à homme en fonction des besoins.
Malgré ces conditions d’hygiène de grande promiscuité, le voyage s’est effectué dans d’assez bonnes conditions, puisque deux décès seulement furent enregistrés. L’un à la suite d’un règlement de compte, et l’autre pour cause de maladie.
Après 35 jours de traversée, le navire accosta au port de Cayenne.