Le bagne: Origines et évolutions.
Une galère
L’appellation « bagnard » trouve ses premières origines dans l’Antiquité grecque et romaine. En effet, dans bien des cas, lorsqu’il s’agissait d'enfermer des prisonniers de guerre ou des malfaiteurs, ces derniers étaient souvent isolés dans d’anciens bâtiments en dur ayant servi de bains publics, dépourvus de grandes ouvertures et pouvant êtres sécurisés facilement. Par la suite, certains détenus dangereux se sont retrouvés dans des bateaux désaffectés aménagés en prisons flottantes pour limiter le risque d’évasion. Dans les cales de ces navires, l’humidité et l’eau croupie étaient permanentes, et les captifs se trouvaient dans un bain permanent avec des conditions de vie particulièrement pénibles. C’est ainsi qu’ils ont pris le nom de bagnards.
La coutume de la vente de ces prisonniers a longtemps été maintenue dans les pays méditerranéens, et au Moyen Age, compte tenu du besoin grandissant ils sont venus renforcer les bancs de nage tenus par des galériens volontaires pour les remplacer définitivement jusqu’à la fin du XVII° siècle. Condamnés aux travaux forcés ces galériens ont été appelés plus communément « forçats » pour former vers 1748 presque la totalité de la chiourme.
Progressivement les galères, devenues armes obsolètes, sont remplacées par des navires plus manœuvrant et la chiourme est placée à terre. Cette réforme entraîne à la fin du XVII° siècle, l’ouverture des bagnes maritimes dans lesquels on enferme les forçats galériens : Toulon de 1748 à 1873 – Brest de 1748 à 1858 – Rochefort de 1776 à 1852
La coutume de la vente de ces prisonniers a longtemps été maintenue dans les pays méditerranéens, et au Moyen Age, compte tenu du besoin grandissant ils sont venus renforcer les bancs de nage tenus par des galériens volontaires pour les remplacer définitivement jusqu’à la fin du XVII° siècle. Condamnés aux travaux forcés ces galériens ont été appelés plus communément « forçats » pour former vers 1748 presque la totalité de la chiourme.
Progressivement les galères, devenues armes obsolètes, sont remplacées par des navires plus manœuvrant et la chiourme est placée à terre. Cette réforme entraîne à la fin du XVII° siècle, l’ouverture des bagnes maritimes dans lesquels on enferme les forçats galériens : Toulon de 1748 à 1873 – Brest de 1748 à 1858 – Rochefort de 1776 à 1852
Une salle au bagne de Rochefort.
LES BAGNES COLONIAUX: Création.
En 1791, la réforme du code pénal supprime la peine des galères et la remplace par la peine des fers. Ainsi les condamnés sont employés à des travaux forcés au profit de l’Etat, soit dans des maisons de forces, soit dans les ports et les arsenaux. Le surpeuplement des bagnes, le manque d’équipements et de nourriture rendent encore plus désastreuses les conditions de vie des détenus. Pendant la Restauration se développe un débat sur la réforme du système pénitentiaire. Ainsi s’opposent les partisans des valeurs morales et de réhabilitation du travail des bagnards aux partisans d’une déportation du bagne vers les colonies. Le bagne coûte cher, il n’est plus efficace et gêne la Marine qui cherche en s’en débarrasser.
Les évènements de 1848 et le coup d’état de Louis Napoléon en 1851 précipitent l’ouverture des bagnes coloniaux. Il s’agit d’éloigner le plus loin possible de France des individus constituant une menace pour l’Empire. En 1850 est autorisée la déportation des prisonniers politiques et la transportation est instituée pour les individus placés sous la surveillance de la police. C’est en 1852 que deux décrets organisent les bagnes de Guyane.
La loi de 1854, relative à l’exécution de la peine des travaux-forcés et à la transportation, installe le bagne d’Outre-Mer. Assortie de l’institution du doublage de la peine de travaux forcés, elle répond à plusieurs préoccupations des décideurs de cette époque :
- éloigner définitivement les individus indésirables sur le territoire national ;
- peupler les colonies au moyen d’une main-d’œuvre qui leur fait défaut depuis l’abolition définitive de l’esclavage en 1848 ;
- servir aux progrès de la colonisation française.
Les évènements de 1848 et le coup d’état de Louis Napoléon en 1851 précipitent l’ouverture des bagnes coloniaux. Il s’agit d’éloigner le plus loin possible de France des individus constituant une menace pour l’Empire. En 1850 est autorisée la déportation des prisonniers politiques et la transportation est instituée pour les individus placés sous la surveillance de la police. C’est en 1852 que deux décrets organisent les bagnes de Guyane.
La loi de 1854, relative à l’exécution de la peine des travaux-forcés et à la transportation, installe le bagne d’Outre-Mer. Assortie de l’institution du doublage de la peine de travaux forcés, elle répond à plusieurs préoccupations des décideurs de cette époque :
- éloigner définitivement les individus indésirables sur le territoire national ;
- peupler les colonies au moyen d’une main-d’œuvre qui leur fait défaut depuis l’abolition définitive de l’esclavage en 1848 ;
- servir aux progrès de la colonisation française.
Statue de Bertrand Piéchaud -la peine du bagnard.
CHANT TRADITIONNEL DU BAGNE.
On découvre ici, le texte d’un chant traditionnel du bagne qui est l’œuvre d'un bagnard « libéré ». Ce document a été enregistré en 1951 par Henri Charrière dit PAPILLON, à Saint Laurent du Maroni à l’occasion de son premier retour dans cette ville après sa libération, dans le cadre de la promotion de son livre. Il s'agit d'un poème de Fitoussi qui se chantait sur l'air "les batelier de la Volga".
Titre de la chanson : Je suis un forçat.
A écouter en cliquant sur la pièce jointe en bas de la page.
Le cri d‚une sirène
Un bruit de chaînes
Le convoi part
Ils sont hâves et blêmes
Tout un poème
En leur regard
Cohorte douloureuse
C‚est l‚armée malheureuse
De ceux que Thémis appelle Aujourd‚hui
Qui vont quitter à jamais leur pays
(complété sur les aimables informations d'un lecteur, commentaire n°26)
Soudain l’un d’eux s’arrête,
en inclinant la tête,
c’est qu’on vient de lui dire tout bas
ces simples mots tu n’es qu’un forçat.
La bas à la Guyane,
dans la savane et les chantiers,
combien de pauvres ères
dans la misère semblent expier.
Des rires de folies,
des râles d’agonies,
semblent monter au-dessus des cachots
dont parfois monte un lugubre sanglot.
La fièvre qui les terrasse,
la mort qui les menace,
toute la gamme des maux d’ici-bas
semblent planer sur le corps du forçat.
L’évasion est un crime
que l’on réprime sévèrement,
la réclusion horrible
et ses terribles isolements.
Misère physiologique,
celle, vengeur tragique,
d’une société cruelle ou vaincu,
un cri, un râle, un forçat à vécu.
Le requin, bête immonde,
semble guetter dans l’ombre,
le corps qu’on jette entouré d’un vieux drap,
et c’est ainsi que finit le forçat.
Commentaires exclusif de PAPILLON enregistrés en 1951 (à écouter en cliquant sur la pièce jointe en bas de la page) « Combien est émouvante cette chanson de ce malheureux, et combien aussi, malheureusement, il confirme tout ce que je dis dans mon livre. D’abord la fièvre, les cachots, la mort. Dans des endroits où, un sur dix, un sur vingt, peut se sauver dans ces travaux formidables, comme couper le bois dans les camps de Charvein ou d’ailleurs. Et puis, cette ignominie quand il se sent le forçat. Il vient de comprendre ce qu’est un forçat, c’est-à-dire une immondice de la société au moment de partir.
L’évasion ! L’évasion, que non seulement on cherche à étouffer dans son être, mais encore que l’on poursuit comme l’on poursuit un animal avec les chasseurs d’hommes afin de l’éliminer plutôt que de lui donner une chance de revivre, et s’il est repris ? La réclusion ! Cette fameuse réclusion que quelques journaux ont prétendu, que des témoignages de surveillants, des gens, bien entendu, intéressés à dire, que ce n’était pas du tout comme je le racontais.
Mais lui le malheureux dans sa chanson, il le dit, cette réclusion horrible, terrible isolement. Atteint tous en commun de misère physiologique, il l’accuse lui-même, dans sa chanson, des bas-fonds de Saint Laurent du Maroni, cette société cruelle,inutilement cruelle. Cette société, qui au lieu de se défendre contre les gens qui commettent un délit, se venge, ce qui ne peut être accepté.
Et puis la fin ! La fin du forçat. Ces enterrements que je décris dans mon livre, où l’on jette ces corps, entourés de sacs de farine, en pâtures aux requins des Iles Royales, qui étaient ni plus ni moins, que le dernier moment où le forçat arrivait à sa limite de mépris de la société. On lui refusait même de l’enterrer comme un homme, on le donnait en pâtures aux requins…La cloche qui appelait ces requins au moment de l’enterrement était une espèce de … C’était la fin… La société était vengée, ou, la société croyait ainsi pouvoir faire disparaître par les requins tout vestige d’un homme qui avait commis quelques petits délits et qui lui avait apporté quelques douleurs à la tête.
Toute cette chanson, c’est la conclusion indiscutable de ces chemins de la pourriture, comme je le décrits, je crois même qu’ils sont en dessous de la vérité. »
Titre de la chanson : Je suis un forçat.
A écouter en cliquant sur la pièce jointe en bas de la page.
Le cri d‚une sirène
Un bruit de chaînes
Le convoi part
Ils sont hâves et blêmes
Tout un poème
En leur regard
Cohorte douloureuse
C‚est l‚armée malheureuse
De ceux que Thémis appelle Aujourd‚hui
Qui vont quitter à jamais leur pays
(complété sur les aimables informations d'un lecteur, commentaire n°26)
Soudain l’un d’eux s’arrête,
en inclinant la tête,
c’est qu’on vient de lui dire tout bas
ces simples mots tu n’es qu’un forçat.
La bas à la Guyane,
dans la savane et les chantiers,
combien de pauvres ères
dans la misère semblent expier.
Des rires de folies,
des râles d’agonies,
semblent monter au-dessus des cachots
dont parfois monte un lugubre sanglot.
La fièvre qui les terrasse,
la mort qui les menace,
toute la gamme des maux d’ici-bas
semblent planer sur le corps du forçat.
L’évasion est un crime
que l’on réprime sévèrement,
la réclusion horrible
et ses terribles isolements.
Misère physiologique,
celle, vengeur tragique,
d’une société cruelle ou vaincu,
un cri, un râle, un forçat à vécu.
Le requin, bête immonde,
semble guetter dans l’ombre,
le corps qu’on jette entouré d’un vieux drap,
et c’est ainsi que finit le forçat.
Commentaires exclusif de PAPILLON enregistrés en 1951 (à écouter en cliquant sur la pièce jointe en bas de la page) « Combien est émouvante cette chanson de ce malheureux, et combien aussi, malheureusement, il confirme tout ce que je dis dans mon livre. D’abord la fièvre, les cachots, la mort. Dans des endroits où, un sur dix, un sur vingt, peut se sauver dans ces travaux formidables, comme couper le bois dans les camps de Charvein ou d’ailleurs. Et puis, cette ignominie quand il se sent le forçat. Il vient de comprendre ce qu’est un forçat, c’est-à-dire une immondice de la société au moment de partir.
L’évasion ! L’évasion, que non seulement on cherche à étouffer dans son être, mais encore que l’on poursuit comme l’on poursuit un animal avec les chasseurs d’hommes afin de l’éliminer plutôt que de lui donner une chance de revivre, et s’il est repris ? La réclusion ! Cette fameuse réclusion que quelques journaux ont prétendu, que des témoignages de surveillants, des gens, bien entendu, intéressés à dire, que ce n’était pas du tout comme je le racontais.
Mais lui le malheureux dans sa chanson, il le dit, cette réclusion horrible, terrible isolement. Atteint tous en commun de misère physiologique, il l’accuse lui-même, dans sa chanson, des bas-fonds de Saint Laurent du Maroni, cette société cruelle,inutilement cruelle. Cette société, qui au lieu de se défendre contre les gens qui commettent un délit, se venge, ce qui ne peut être accepté.
Et puis la fin ! La fin du forçat. Ces enterrements que je décris dans mon livre, où l’on jette ces corps, entourés de sacs de farine, en pâtures aux requins des Iles Royales, qui étaient ni plus ni moins, que le dernier moment où le forçat arrivait à sa limite de mépris de la société. On lui refusait même de l’enterrer comme un homme, on le donnait en pâtures aux requins…La cloche qui appelait ces requins au moment de l’enterrement était une espèce de … C’était la fin… La société était vengée, ou, la société croyait ainsi pouvoir faire disparaître par les requins tout vestige d’un homme qui avait commis quelques petits délits et qui lui avait apporté quelques douleurs à la tête.
Toute cette chanson, c’est la conclusion indiscutable de ces chemins de la pourriture, comme je le décrits, je crois même qu’ils sont en dessous de la vérité. »