Historique
300 ans plus tard, c’est sous l’impulsion de Charles de Blanchefort de Créqui qu’un nouveau château émerge sur les fondations médiévales. Au début du XVII° siècle, vers 1620, les premiers travaux du château débutent avec un corps de logis central.
Charles de Blanchefort de Créqui était l’époux de Magdelaine de Bonne de Lesiguières, fille héritière de François de Bonne, duc de Lesdiguières, maréchal et connétable de France. L’héritage considérable que promettait de laisser François de Bonne était à saisir, car n’ayant pas eu de fils, son futur gendre était destiné à relever son titre. Seulement, la première femme de Charles de Blanchefort de Créqui décéda très jeune.
Alors, à peine était-elle morte que Créqui se remaria en 1623 avec une sœur légitime de la défunte, Françoise.
De puissants intérêts poussaient les deux familles à s’unir ! Et pour faire bonne mesure, le fils de Charles de Blanchefort de Créqui, François, épousa l’autre sœur, Catherine, devenant ainsi le neveu de sa femme ! Devenu maréchal de France et duc de Lesdiguières, Charles de Créqui, nanti d’une importante fortune peut donc faire émerger son château rapidement.
Malheureusement, Charles de Créqui ne put profiter de sa nouvelle demeure. Il fut fait maréchal de France en 1622, il reprit les armes l’année suivante, lors de la guerre qui opposa Louis XIII à son beau-frère, Victor-Amédée 1er de Savoie et après avoir passé le Milanais, ravagea la région de Novare et Mortare. En 1638, il se porta à la défense du fort de Brême, en Piémont et décéda sur le champ de bataille devant le fort.
Interrompu par la mort du maréchal de Créqui, les travaux reprennent dans la seconde moitié du XVII° siècle, sous la direction de François de Créqui, qui fut comme son père maréchal de France et duc de Lesdiguières. A sa mort , le château passe à une petite fille de Charles de Blanquefort de Créqui, Catherine de Villeroy, en 1703, Epouse du prince Louis de Lorraine, comte d’Armagnac et grand écuyer de Louis XIV, la princesse était aux dires de Saint-Simon « avec une vilaine taille grosse et courte, la plus belle femme de France jusqu’à sa mort à 68 ans ».
En 1748, ses héritiers vendent le château à Etienne, comte de Drée, qui fait intégralement réaménager les intérieurs du Château. Louis XV, par lettre patente datant de 1767, fait ériger en marquisat en faveur de « son cher et bien aimé Etienne, comte de Drée » la terre de la Bazolle, qui dès lors prend le nom de Drée. Etienne est le premiers marquis du nom. Son fils Etienne-Gilbert I et son petit-fils Etienne-Gilbert II furent ses successeurs dans la possession de la terre de Drée jusqu’en 1837.
Epargné par la Révolution, Drée sera acquis par la comtesse de Tournon-Simiane, vers 1837, qui fera effectuer quelques réaménagements. Ce château sera ensuite transmis par héritage aux Croix, puis aux Croÿ.
Depuis 1995, il est la propriété de Ghislain Prouvost.
Son architecture
Bâti selon un plan en U, l’ensemble s’ordonne autour d’un corps de logis principal qui occupe le fond de la cour, et qu’encadrent deux ailes en retour, terminées par des pavillons légèrement déportés par rapport à l’axe.
Les angles rentrants entre le corps de logis principal et les ailes sont adoucis par des pans concaves. Elevés sur un sous-sol, et comportant un rez-de-chaussée, un étage carré et un étage de comble, les bâtiments encadrant la cour se signalent par un savant jeu de lignes.
Les fenêtres du rez-de-chaussée sont surmontées par des frontons triangulaires que relie entre eux une corniche ; les fenêtres de l’étage noble sont, pour leur part, couvertes de linteaux en arc segmentaires, et un bandeau règne au niveau de leurs appuis.
Le comble enfin est percé de lucarnes à fronton triangulaires, sommés de boules d’amortissement . Cette façade révèle le vocabulaire sobre et strict de l’architecture du XVII° siècle. Seulement au XIX° siècle, sous l’impulsion de la comtesse Augustine de Tournon-Simiane, le corps de logis central, précédé de quelques degrés, s’est vu orné par un portique central dans le goût pastiche, fait de trois travées, constitué par deux rangs de colonnes à bases attiques que terminent des chapiteaux en tête d’animaux.
Ces colonnes soutiennent un balcon à balustre en pierre, sur lequel ouvrent trois portes-fenêtres encadrées par des colonnes ornées de chapiteaux à motif de feuillages.
Au-dessus, une corniche à modillons est placée sous un muret, qui supporte l’écu sculpté armorié des Tournons-Simiane, encadré de deux lions de pierre accroupis affrontés ?
Côté parc, la façade, dépourvue d’ailes et seulement cantonnée de pavillons, se fait plus dépouillée, l’avant-corps est couronné par un simple fronton, attribut architectural relativement rare encore au début du XVII° siècle.
Les intérieurs
Tout d’abord, l’immense cuisine sous une voûte en parapluie, où les accessoires nécessaires à l abonne confection de tous les mets ont été conservés : la cheminée, le potager, le « piano », les casseroles, les pots de fer-blanc, le four.
Une grande équipe devait être au service du seigneur sous l’œil vigilant du chef cuisinier, installé dans sa chambre à mi-étage et surplombant la cuisine.
Pour appeler son personnel, le maître des lieux disposait d’un système de cloches reliées à travers toute la demeure qui émettaient chacune un son différent.
La salle à manger Directoire est frappante par son grand vaisselier présentant une très importante et rare collection de faïences hollandaises de Delft polychromes du XVIII° siècle.
Comme dans toute grande demeure de qualité de l’époque classique un appartement été réservé au roi. Cet appartement renferme quelques belles pièces de mobilier, bergère à oreille de Julienne, duchesse brisée de Blanchard, fauteuils cabriolets de Nogaret, tapisseries des Gobelins, commodes d’époque Régence…
A la suite de la chambre du roi, un ravissant boudoir chinois montre des papiers peints du XVIII° siècle en parfait état de fraîcheur.
A la sévérité du pavement noir et blanc du hall d’entrée aux armes de la comtesse Augustine de Tournon-Simiane, répond l’esprit romantique des toiles peintes de l’école de Vernet.
Représentant différents ports de France, ces marines montrent cette volonté d’humaniser les paysages et ces sens de la lumière qui va marquer les premiers romantiques du XVIII° siècle.
Contre les lambris une superbe vasque d’époque Louis XIV en marbre et plomb doré fait face à un intéressant poêle en faïence de l’Est du XIX° siècle, entouré de buste en marbre des Bonaparte.
Le salon Louis XVI avec son décor de faux marbre évoque l’engouement pour l’antiquité gréco-romaine à l afin du XVIII° siècle. Prépondérances de lignes droites, représentations grecques dans des médaillons de stucs…
Doté de canapés et de fauteuils recouverts de tapisseries d’Aubusson relatant les fables de La Fontaine, ce salon présente également un tapis réalisé d’après un original de la Savonnerie.
La discrète et subtile harmonie des tentures permets de mettre l’acent sur un mobilier prestigieux : le portrait du roi de France Louis XVI par Callet, un bureau à cylindre de Molitor et un extraordinaire cartel d’époque Louis XIV.
Dans le salon Louis XV, c’est le portrait du régent de France en armure que l’on peu apprécier, portrait ayant appartenu aux collections royales.
Le grand salon rocaille aux boiseries d’époque Régence, comporte des dessus-de-porte en grisaille et, aux angles de la pièce des trophées sculptés d’une rare qualité. Au plafond, des bouquets et des guirlandes sont disposés dans des cadres chantournés. On trouve ce style dans les pièces attenantes, où les boiseries sculptées de coquilles, de rubans et de fleurs, sont également rehaussées de couleurs vives et contrastées (telle que les appréciait le roi Louis XV)
Le mobilier d’époque Régence et Louis XV comprend de nombreux fauteuils et canapés de Nogent à Lyon ainsi que des tables à « en cas », une étonnante commode-bureau de Bodeux, des tableaux historiques et de s bronzes.
Les appartements de l’aile sud sont d’une qualité de boiseries et de stucs rarement rencontré en province et sont une succession de salles meublées où se retrouvent de nombreuses faïences de Delft polychromes du XVIII° siècle.
Le salon d’hiver, qui rappelle le boudoir de Marie-Antoinette à Versailles par son alcôve, est intéressant par ses signes maçonniques, témoins des tendances philosophiques du XVIII° siècle.
La salle à manger d’hiver comporte des trumeaux rappelant l’amour galant.
Enfin, toujours au rez-de-chaussée, la chapelle donne à voir une voûte en parapluie peinte à fresque d’étoiles.
Dédiée au Sacré-Cœur de Jésus, cette chapelle montre quelques vitraux du XIX° siècle représentant la vie de la Vierge.
Les tableaux italiens du setecendo attribués à Bandinelli, élève de Guido Reni, représentent Saint Jean et Sainte Cécile.
Deux anges du XVI° siècle en bois proviennent de Flandre.
Au premier étage, de nombreuses chambres, toutes meublées, présentent un caractère constant : l’appartement au XVIII° siècle était toujours constitué de l’antichambre, la chambre ou l’on recevait et le cabinet (de travail), plus privé.
Ces appartements qui se visitent (une douzaine) ont été miraculeusement préservés et certains présentent même des tissus muraux de la fin du XVIII° siècle, ce qui est particulièrement rare.
Enfin, de nombreux tableaux de Largilière, Natier, etc…ainsi que des commodes, coiffeuses, fauteuils, bronzes, faïences, gravures, présentent une image assez exacte de la vie intérieure d’une grande demeure du siècle des Lumières.
Les escaliers intérieurs du château sont au nombre de quatre et tous en pierre. Ils permettaient une communication facile au sein de ce grand monument qui, par ses perspectives parfaites, sa disposition de pièces ingénieuses, ses symétries rigoureuses, nous révèle un très grand architecte dont l’histoire ou les archives n’ont pas (encore) révélé le nom.
Les dépendances et les jardins
Le chenil en contrebas du pont abritant la meute pour la chasse à courre, activité que pratiquaient couramment les seigneurs de Drée sur leur domaine de 500 hectares.
Côté jardin, la salle des bains du début XIX° siècle, restaurée, laisse à voir des peintures en trompe l’œil, des baignoires et bassins en zinc et système de chauffage au bois…
Autour du château, un parc de 60 hectares permet de découvrir de superbes jardins à la française. Depuis quelques années ont été replantés plus de 40 000 bois pour redonner aux jardins l’éclat du XVIII° siècle.
Dans la première cour du château, on découvre un ensemble de parterres de verdure aux tracés géométriques. Par la terrasse qui entoure le château, on progresse vers la serre, puis le jardin sud. La promenade bordée de rosiers sur tiges, conduit à une vaste roseraie encadrant un ancien bassin d’arrosage en forme de poisson. Ce dernier, orné de jets d’eau et des « putti » de Jean de Bologne, donne un aspect très agréable à ce jardin sud, dominant le bocage du Charolais-Brionnais.
Puis le chemin s’ouvre sur de vastes terrasses à la française d’une grande élégance : la première est ornée de parterres en dentelles de buis (2300 m2), une paire de bronze représentant Diane et Apollon encadrent cette terrasse.
En contrebas, le jardin des topiaires présente en son centre la fontaine aux Ammanatti garnie de naïades que Jean de Boulogne avait réalisées pour la fontaine de Neptune à Florence. Puis la perspective se prolonge car passé le « haha » (petit mur de pierre), un grand bassin parachève la composition (qui reprend celle du château de Champ-sur-Marne, près de Paris). Ce dernier menant à une élégante petite folie, « la tour des demoiselles »
Pour visiter le château en images, cliquez ICI
Sources : document de visite – textes Ghislain Prouvost - M.G. EDITIONS
Contact : 03 85 26 84 80 –chateau.de.dree@wanadoo.fr
Internet : www.chateau-de-dree.com
Ouvert d’avril à octobre ( ouvert toute l’année pour les groupes – réservation obligatoire)
Visites guidées et commentées des intérieurs meublés (1 heure)
Visite libre des jardins