À la rencontre de son œuvre
Ainsi, quatre années lui seront nécessaires pour réinventer l’ancestrale technique des émailleurs médiévaux. Quatre longues années d’essais et de tâtonnements dans les domaines de la chimie et de l’oxydation, pour voir réapparaître les teintes oubliées du rouge et du bleu de cuivre. Dès lors, il apprend à maîtriser la chauffe des plaques de cuivre sur lesquelles il applique les différentes couches de ses mélanges. Il obtient des résultats dépendants du nombre de passage au four et surtout de la température de ce dernier. Ces opérations successives doivent être gérées de manière très précise afin d’obtenir la transparence des couches et le chromatisme recherché, c’est la science du feu qui est apprivoisée, qui est renouvelée…
D’autre part, il doit franchir un autre palier dans l’évolution de sa démarche artistique, qui est de travailler sur de grandes plaques de cuivre d’un seul tenant. Pour cela, il doit se familiariser à la dinanderie, profession quasiment oubliée de batteur de cuivre. Ainsi, chaque plaque de métal est repoussée, c’est-à-dire sculptée à l’envers, au burin et au chalumeau pour que le motif apparaisse en relief. Travail méticuleux et très précis, pour lequel il invente une méthode qui encore de nos jours n’a pas été reproduite. Sous les doigts habiles de l’artiste et les multiples touches des outils dont il a le secret, la matière se convulse, s’étire, se cabre, se galbe pour devenir forme humaine dont les arrondis et les courbes harmonieuses sont sa marque de fabrique, sa conception du « loyal travail » hérité des compagnons du Moyen-Âge. Ses travaux vont rapidement le faire remarquer dans un Paris où, au début du XXe siècle, on fait d’intéressantes rencontres.
Robert Barriot expose pour la première fois à la Société Nationale des Beaux-Arts et au Salon d’automne des artistes français, avec des critiques élogieuses. En 1925, il obtient la médaille d’argent à l’exposition internationale de Paris ; en 1926, la médaille d’or à l’exposition des Arts décoratifs de Madrid. Membre du groupement des artistes de la Société de Saint Jean, il est choisi lors de l’exposition coloniale de 1931 pour réaliser la façade en grès émaillé grand feu de l’église Notre Dame des Missions. Cet édifice sera transféré définitivement à Epinay-sur-Seine ; il est aujourd’hui classé par les Monuments historiques. En 1937, il reçoit la médaille d’or à l’Exposition internationale de Paris pour sa porte de l’Artisanat en aluminium orné d’écussons émaillés.
De retour à l’église Sainte-Odile après la guerre, il expose de manière permanente dans l’auditorium, attirant de nombreux visiteurs. Mais il refuse de passer par des galeristes compte tenu de la difficulté à accepter de se séparer de ses œuvres. Robert Barriot n’arrive pas à gagner sa vie malgré un certain nombre de commandes. Il luttera toute son existence contre la pauvreté.
En 1953, expulsé de l’église Sainte-Odile, il trouve refuge dans le Berry à Chezal-Benoit. Il y passera les vingt dernières années de sa vie, en produisant des œuvres remarquables, témoins de son incessante recherche sur l’émail. Sa vie se conclura dans une grande tristesse, désabusé par l’échec de deux de ses projets les plus ambitieux, faute de soutiens : un chemin de croix en émail polychrome de 42 m de long, destiné à la cathédrale de Bourges et une histoire du Berry, rédigée en incunable et illustrée de gravures à la pointe sèche. Sa dernière réalisation prend le visage du désespoir en la représentation d’une Apocalypse ou Jugement dernier, qui porte un regard déchiré sur une humanité dévastée.
L’obstination de l’artiste revêt de nos jours un avantage inestimable, du fait que l’intégralité et la conservation de ce trésor, de plus de 200 pièces, sont entre les mains de ses enfants Frédéric et Catherine Barriot. Ainsi, toute galerie ou musée qui prendraient conscience de l’intérêt à présenter au grand public ces chefs-d’œuvre serait en mesure d’organiser très rapidement une exposition.
Dans ce contexte, le 30 mai 2013, une journée exceptionnelle a été organisée par les membres de l’Association Robert Barriot « Arts & Feux » pour aller à la rencontre de l’intégralité de cette collection.
C’est la Forteresse de Villeneuve-Loubet qui fût l’écrin de cette visite et qui permit à une vingtaine de privilégiés, spécialistes et journalistes du patrimoine, de découvrir ces merveilles. Soutenue et organisé par M. le marquis de Villeneuve-Loubet, Jacques de Panisse-Passis et Mme la marquise Marie Sophie de Robin de Barbentane, la visite était guidée et commentée par Frédéric et Catherine Barriot accompagnée d’intervenants de marque, comme Andreù Vilasis, émailleur, ancien directeur de l’École d’arts appliqués de Barcelone, directeur du musée de l’Émail contemporain de Salou (Tarragona), président du Comité national des émailleurs espagnols, membre de l’association internationale des critiques d’art (AICA), accompagné de Nùria Lopez Ribalta, spécialiste des techniques de l’émaillage et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet.
Avec les œuvres présentées de manière harmonieuse dans le parc ou les pièces du château, la visite et les commentaires de la famille Barriot ont comblé les visiteurs, persuadés que cette initiative devrait être retenue par un musée, une galerie de renom ou une fondation pouvant ainsi réparer l’injustice que cet artiste a subie de son vivant. Il sera temps alors pour les critiques d’analyser son œuvre. Robert Barriot n’est plus là pour nous éclairer, la lumière de ses émaux nous aidera peut-être.
L’acrobate à la boule – cuivre repoussé – (2 m x 1 m)
Adam et Ève – cuivre repoussé – 1960 (1,98 m x 0,69 m)
Robert Barriot dans un entretien réalisé par la Nouvelle République en 1960
La Fade – cuivre repoussé émaillé – 1956 (96 cm x 91 cm)
Aluminium repoussé (1 m x 1 m)
Christ aux Larrons – cuivre repoussé émaillé – (2,10 m x 0,85 m)
Cette liberté dans le traitement des thèmes religieux ne tire jamais à l’irrévérencieux mais, au contraire confère aux figures évangéliques des qualités plus humaines, plus accessibles. On sent dans toute l’œuvre de Barriot une volonté d’humaniser le sacré et de sacraliser l’humain. Rue Blondel, se plaisait à raconter l’artiste, « j’ai décoré un bordel. Je l’ai fait avec d’autant d’intérêts qu’un chemin de croix. C’est un sujet tout aussi humain. »
La véritable trame de l’œuvre, c’est la condition humaine. Ce qui fait que cette œuvre nous touche au plus profond, c’est qu’elle reflète l’essentiel de notre nature, de nos questions et de nos errements. Robert Barriot a illustré « Les galériens », un poème de Constant Hubert, par une série de plaques non émaillées, en cuivre brut. Ces illustrations, comme les mots du poète, forment sans doute la quintessence de sa vision de monde et de la place de l’homme dans celui-ci.
Les yeux de personnages de Barriot sont toujours exorbités, fixes ou fuyants, ils sont les premiers à capter, à attirer irrésistiblement les nôtres. Hantés par la vrille vertigineuse de leurs réflexions vitrifiées, ils magnétisent inéluctablement notre propre regard, comme des questions sans réponses.
Il en est un surtout qui résume toutes les interrogations et les douleurs humaines. C’est « Œdipe » cuivre repoussé émaillé (0,70 m x 0,60 m) dont les yeux sont crevés et qui, la bouche tordue par l’indicible souffrance, semble articuler une plainte muette. Dans ses orbites vides, dans les milliers de sillons et de hachures longuement burinées, l’émail rouge de cuivre, lors des cuissons successives, a coulé en micro-fleuves de feu.
Danse macabre – émail polychrome – 1944-1949 (0,94 m x 6,00 m)
Siège social: 2431, route de Cagnes - 4, résidence la Bergerie - 06140 Vence - France
Tél: (+33) 93 24 04 98 - contact@robertbarriot.com
www.robertbarriot.com
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À la rencontre de l’œuvre de Robert Barriot - vidéo
Projet de la mise en lumière du retable de l'église Sainte Odile (Paris 17ème)
Ce chef d'œuvre, réalisé par un seul homme, en cuivre repoussé émaillé aux dimensions exceptionnelles de 3.17m de haut d'un seul tenant x 0.76m, fait unique dans toute l'histoire de l'émail, a été classé à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 2001.
C’est la plus grande œuvre émaillée au monde
Suite aux nombreuses demandes qui nous ont été adressées pour que cette œuvre "Unique au monde" bénéficie d'un éclairage digne de ce nom, l'Association Robert Barriot Arts-et- Feu, fait appel au mécénat auprès de:
Electricité de France - La Mairie du 17éme arrt - Le Ministère de la Culture - Les Métiers d’Art.
Pour soutenir ce projet, l'Association Robert Barriot Arts- et- Feu a aussi besoin de vous et lance une souscription pour réaliser la mise en lumière du retable.
Bienfaiteur: A partir de 20€ - Autre :..........€
Bulletin de souscription en téléchargement ci-après.
Nous sommes à votre disposition pour vous faire découvrir en privé, l'exceptionnelle collection Robert Barriot à Vence (06) - Contact: Catherine Bonnin-Barriot - P/06.84.53.09.14